La Direction du Front Populaire Ivoirien (FPI) a récemment enregistré dans ses rangs une défection de taille, en la personne de Seydou Koulibaly, désormais ancien-vice président du parti dirigé par Pascal Affi N’guessan. Quelques jours après sa démission de la direction du parti à la rose, Seydou Koulibaly à la faveur d’une interview accordée à un confrère, est revenu sur les raisons qui l’ont poussé à se retirer de la vice-présidence de son parti.
Celui qui milite au FPI depuis 1990, dit avoir quitté la direction de ce parti politique, pour des raisons de “convenances personnelles”. “ Disons que depuis 1990, j’ai gravi les différents paliers du Front Populaire Ivoirien, du secrétaire général de section à la Vice-présidence chargée du Protocole et de l’Organisation des Manifestations, de la Politique de Réconciliation Nationale du parti, de la lutte contre les Discriminations, Conseiller politique du Président Affi N’guessan Pascal, en passant par le secrétariat général de fédération, le secrétariat national, chef de cabinet et directeur de cabinet du Président du parti. Je pense donc qu’il est objectivement difficile pour les uns et les autres de me faire un procès de fidélité et de compétence au niveau du FPI.
Tous ceux qui ont pris connaissance de mon courrier de démission, ont dû noter que la première phrase parle de ” raisons de convenance personnelle ” et d’harmonie avec ma conscience “. Vous conviendrez avec moi que l’expression “convenance personnelle” est un fourre-tout et comme telle, elle évite les vagues et les interminables explications. Il faut donc s’arrêter sur le bout de phrase relatif à “harmonie avec ma conscience”. Ma conception de l’engagement politique est qu’il doit impérativement reposer sur des valeurs et des lignes rouges”, explique-t-il.
Poursuivant ses explications, il fait savoir qu’il y a deux raisons majeures qu’il considère d’ailleurs comme des lignes rouges franchies qui motivent sa décision.
“Premièrement, la rupture unilatérale du partenariat par le Président Affi. En effet cette rupture s’est faite contre la volonté de la majorité des cadres du parti qui ont suggéré que s’il doit avoir dénonciation du partenariat celle-ci intervienne après la rencontre bilan demandée par le partenaire RHDP. Le Président Affi s’est opposé sans justification convaincante à cette démarche scientifique, en opérant un passage en force”, revèle-t-il.
Seydou Koulibaly rappelle en outre que “ l’un des objectifs de ce partenariat demandé par le Fpi était de nous sortir de l’isolement après la victoire sur M. Laurent Gbagbo et la fin de non-recevoir du PDCI. Alors la question que je pose au Président Affi est la suivante : Le FPI n’a-t-il plus peur de l’isolement ? A contrario, qui est le futur partenaire du FPI à l’occasion des prochaines joutes électorales ? Manifestement, la démarche manque de cohérence, de consistance et ma conscience s’y refuse. Quelques soient les explications avancées par les anti partenariat, ma conscience me recommande de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Deuxièmement, loin de puériles récriminations, le passif entre les Gors et les militants du Fpi est l’expression d’un combat des valeurs d’humanisme, de démocratie et de justice contre la négation de ces mêmes valeurs et principes”, a-t-il confié.
Du coup, pour l’ancien vice-président et de nombreux cadres et militants du FPI, le retour dans les bras de Laurent Gbagbo se présente également comme une ligne rouge. “ Ce que vos lecteurs doivent savoir sur cet appel, c’est qu’en aucun moment le sujet n’a été mis sur la table des instances du parti, pour s’entendre dire de façon surprenante et cavalière lors d’une conférence de presse du PPA-CI, que le FPI et son Président ont été consultés et qu’ils ont donné leur accord de principe. Alors, la question que j’adresse au Président Affi est la suivante : Est-ce le PPA-CI le futur partenaire du FPI ? Les militants veulent bien savoir afin d’aviser, car ils sont nombreux ceux qui n’entrevoient pas un retour dans les bras de M. Laurent Gbagbo. L’argument de l’éventuelle décrispation des relations entre militants des deux partis demeurant insuffisant. Manifestement, nous sommes ici non seulement dans un déni de démocratie mais aussi dans un recul de dignité et ma conscience s’y refuse”, s’est-il voulu clair.
Seydou Koulibaly a certes quitté la vice-présidence du FPI, mais il n’a pas démissionné du parti, comme il s’évertue à fait comprendre. “ Dans la brève présentation que j’ai faite en début d’échanges, vous avez dû constater que j’ai plus de 30 ans de militantisme et de présence au FPI. C’est tout une vie consacrée à la défense d’un idéal d’humanisme, de démocratie et de justice comme prôné par la social-démocratie le référent idéologique de mon parti. Ce travail doit se poursuivre avec abnégation et intelligence. Autrement dit, savoir s’adapter à la dynamique des contextes en fuyant les dogmes sclérosants. Il s’agit pour moi et pour d’autres cadres du parti, de travailler à l’avènement d’une gouvernance qui peut faire rêver au sens noble du terme, les militants et l’ensemble des ivoiriens. Dans ce concert des partis politiques, il faut impérativement nouer des partenariats et des alliances qui peuvent faire avancer le pays et les citoyens avec. Par ailleurs, on peut rendre sa démission d’une direction pour en retrouver une autre plus tard. N’est-il pas dit que Dieu écrit toujours droit dans les courbes de notre existence ?”, a-t-il précisé.
Répondant à Affi N’guessan, qui a estimé récemment que ses camarades qui sont pour la poursuite du partenariat avec le Rhdp, pensent plutôt à leurs intérêts immédiats, Seydou Koulibaly a déclaré : “ Il ne vous a pas échappé que je suis un fervent pro partenariat et pourtant je ne suis ni Vice-président de conseil régional, ni adjoint au maire. Je ne défends donc aucun intérêt immédiat. Il n’y a pas d’intérêts autres que ceux visés par le parti lorsqu’il a demandé et obtenu le partenariat. Les intérêts qui ont sous-tendus la signature du partenariat avec le Rhdp étaient-ils immédiats et personnalisés ? Non, ces intérêts pertinents sont ceux du parti et non ceux d’individus isolés. Quand un camarade est après des élections nommé Vice-président d’un conseil régional ou élu comme adjoint au maire, pour moi c’est un gain politique et social notable. Donc j’ai du mal à saisir la portée incriminante de cette observation. Le Président Affi veut-il insinuer qu’être militant du FPI c’est faire vœu de pauvreté ou signer un bail avec l’effacement ? ”, s’est-il interrogé.
Battant en brèche l’argument de Pascal Affi N’guessan qui soutent que le FPI est sorti affaibli de son partenariat avec le RHDP, l’ancien vice-président déclare: “ A mon humble avis, un partenariat dans sa dimension politique, est un long processus à entretenir jusqu’à maturation. On ne plante pas des pieds de cacaoyers pour 3 mois après aller à la récolte. Un partenariat politique demande, surtout au maillon faible, humilité, stoïcisme, persévérance et diplomatie. Avons-nous au FPI œuvré avec ces instruments ? Comme bon nombre de camarades, je me pose la question. Encore une fois évitons de jeter le bébé avec l’eau du bain”, tranche-t-il.
S’agissant des 100 millions qu’aurait reçus Affi N’guessan selon Sangaré Yacouba, député RHDP de Koumassi, l’interviewé répond : “ Personnellement je n’ai pas eu cette information du Président Affi. Toutefois, faces à ces propos du député Sangaré Yacouba, nous attendons une mise au point du Président Affi”, a-t-il lancé.
Pour le démissionnaire de la direction du FPI, vu l’ampleur de la grogne aujourd’hui dans ce parti, il n’est plus évident que Pascal Affi N’Guessan soit le seul candidat déclaré à la candidature pour la présidence de cette formation politique. “ Le Président Affi apparaissait comme le candidat naturel du FPI à la présidentielle de 2025. Mais aujourd’hui la grave crise interne née de la mauvaise gestion de ces sujets sensibles garantit-elle cette prédisposition initiale ? Des sons discordants se font entendre et parasitent fortement les pas de danse. Manifestement il y a chez le Président Affi un manque de stratégie gagnante. Il court ainsi le risque de se retrouver dans la situation du “Viel homme et la mer” d’Ernest Hemingway, avec à l’arrivée des courses, un squelette dans les mains”, a prévenu Seydou Koulibaly.