Le rapport de l’ONU dénonce des pratiques préoccupantes dans de nombreux lieux de privation de liberté en Côte d’Ivoire et souligne le besoin urgent de réformes pour garantir le respect des droits humains et améliorer les conditions de détention.
Des défaillances majeures dans le système pénitentiaire ivoirien. Le Comité de l’ONU contre la torture a lancé un avertissement sévère à l’égard du régime d’Alassane Ouattara. Dans son rapport publié sur le site de l’organisation internationale le 26 juillet 2024, le Comité souligne des conditions de détention catastrophiques et une surpopulation carcérale alarmante qui touchent gravement les droits humains en Côte d’Ivoire.
Composé de dix experts indépendants, le Comité contre la torture surveille l’application de la Convention contre la torture et les traitements cruels par les États parties. Il s’assure que ces derniers rendent des comptes en enquêtant systématiquement sur les cas de torture signalés pour arrêter et prévenir de telles violations des droits de l’homme.
Dans son rapport, l’organe des Nations Unies révèle une situation critique, où les prisons ivoiriennes, notamment la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) devenu Pôle pénitentiaire d’Abidjan (PPA), accueillent près de trois fois leur capacité maximale.
Cette surpopulation extrême se traduit par des conditions de détention déplorables : insalubrité, manque d’hygiène, absence de ventilation adéquate, ainsi que des rations alimentaires et une eau de mauvaise qualité, fournies en quantités insuffisantes. La privation d’activités récréatives ou éducatives aggrave encore la situation, compromettant la réinsertion des détenus.
En plus de ces conditions inhumaines, le rapport dénonce une violence systémique au sein des établissements pénitentiaires. Les abus physiques commis par les gardiens et les conflits violents entre détenus sont omniprésents, exacerbant la détresse des personnes privées de liberté.
Face à ce tableau sombre, l’organe qui surveille l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, exhorte le gouvernement ivoirien à adopter des mesures immédiates pour désengorger les prisons. Parmi les recommandations : la mise en place d’alternatives à la détention et des améliorations significatives des conditions de détention, afin de répondre aux besoins fondamentaux des détenus.
La réponse de la délégation ivoirienne
Lors de l’examen de la situation à Genève les 16 et 17 juillet 2024, la délégation ivoirienne a défendu ses efforts pour atténuer la surpopulation carcérale, citant l’ouverture récente de nouvelles prisons et l’introduction de mesures alternatives telles que le sursis et la remise de peine. La libération de plus de 11 000 détenus entre 2019 et 2023, grâce aux grâces présidentielles, a également été mise en avant comme une réponse aux critiques.
Néanmoins, le rapport révèle aussi une grave lacune dans la gestion des allégations de torture et de mauvais traitements. Le Comité a exprimé une profonde inquiétude quant à l’absence de mécanismes efficaces de reddition des comptes, soulignant le faible nombre de mesures disciplinaires et de poursuites pénales contre les agents de l’État impliqués.
Cette situation crée un climat d’impunité, entravant la justice pour les victimes de mauvais traitements, selon les experts de l’ONU, qui appellent à des enquêtes rapides, impartiales et menées par des organes indépendants, avec des poursuites judiciaires pour les responsables, y compris les hauts fonctionnaires.
La réponse de la délégation ivoirienne à ces accusations a été de défendre l’existence de mécanismes d’enquête pour traiter les allégations de torture. Cependant, elle a rejeté l’idée qu’il n’existe pas de mécanisme indépendant pour traiter ces plaintes, et a contesté certaines recommandations du Comité.
