« Tchad hourra, France barra » : quelques centaines de manifestants, pour la plupart très jeunes, se sont rassemblés ce vendredi 6 décembre 2024 à N’Djamena, la capitale du Tchad, pour exprimer leur soutien à la rupture des accords militaires avec la France, annoncée la semaine dernière par le pouvoir tchadien.
La foule d’environ 300 à 500 personnes, dont de très nombreux mineurs, s’est retrouvée aux abords du stade de N’Djari avec des affichettes proclamant en français ou en arabe « Tchad hourra, France barra » (« dehors ») et des drapeaux aux couleurs du pays, a constaté l’AFP.
« Après 60 ans de coopération, nous n’avons pas besoin de militaires français, nous avons une armée, nous pouvons défendre notre pays », a déclaré à l’AFP Abdel daim Abdallah Ousmane, le secrétaire général du Conseil supérieur des affaires islamiques, présent à la manifestation.
« Notre manifestation est pacifique, nous ne sommes pas ennemi de la France et la France n’est pas un ennemi pour le Tchad », a-t-il ajouté.
Les autorités ont autorisé le rassemblement à l’intérieur du stade mais ont « interdit formellement toutes les manifestations sur la voie publique », selon un arrêté officiel, ce qui n’a pas empêché de petits groupes de se réunir dans les rues de la capitale vendredi matin. La manifestation s’est dispersée sans incident.
Jeudi, une première manifestation avec les mêmes slogans a réuni quelques centaines de personnes à Abéché, une ville commerçante de l’est du pays, « organisée par le maire » et « encouragée par le gouverneur » régional, selon la télévision publique Tchad infos.
Il s’agit d’une première pour ce pays sahélien, allié traditionnel de la France et dernier État de la région à accueillir ses soldats, qui a annoncé le 28 novembre sa décision de mettre fin aux accords de sécurité et de défense hérités de l’époque coloniale.
« Mission historique »
« Étape cruciale » dans le processus, la commission spéciale créée pour la mise en œuvre de la dénonciation de ces accords a tenu sa première réunion jeudi à N’Djamena pour répondre à cette « mission historique », selon un communiqué de la primature du Tchad.
La décision de rupture, annoncée quelques heures après une visite du chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot, a pris de court Paris qui en a simplement pris « acte », en faisant valoir qu’une réflexion sur la revue de son dispositif militaire en Afrique était déjà en cours.
Après le retrait forcé des troupes françaises du Mali, du Burkina Faso et du Niger, l’annonce surprise du Tchad a coïncidé avec un souhait de fermeture des bases françaises au Sénégal annoncé par son nouveau président Bassirou Diomaye Faye.
La question est désormais de savoir « comment est-ce que nous pourrions réengager la coopération avec ces Etats ? », a déclaré jeudi le porte-parole du Quai d’Orsay Christophe Lemoine, au cours de son point de presse hebdomadaire à Paris, en indiquant que « les discussions sont en cours ».
Le Tchad est dans une situation de transition politique depuis le coup d’Etat qui a porté au pouvoir le général Deby en 2020 avant sa légitimation par une élection présidentielle contestée en avril dernier.
Le pays subit actuellement des attaques du groupe jihadiste Boko Haram dans le nord-ouest, accueille un afflux de réfugiés venus du Soudan voisin et tente de se remettre des dégâts d’une saison des pluies sans précédent qui a fait plus de 2 millions de déplacés.