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En Côte d’Ivoire, une polémique a éclaté après les déclarations xénophobes d’un ministre RHDP visant le président du PDCI. La classe politique s’indigne, une plainte est déposée, relançant le débat sur l’identité nationale.
Une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux a relancé un débat sensible en Côte d’Ivoire. On y voit Célestin Serey Doh, ministre délégué auprès du ministre des Transports et président du conseil régional du Guémon, s’adresser à une foule lors d’une cérémonie de dons à Tacourably, dans le département de Kouibly.
Venu faire don de fauteuils, de broyeuses et de motos d’une valeur totale de 20 millions de francs CFA, le membre actif du RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix) a tenu des propos controversés sur l’origine de Tidjane Thiam, président du PDCI-RDA (Parti Démocratique de Côte d’Ivoire).
« Il s’appelle Thiam. Quand tu quittes le Sénégal pour venir en Côte d’Ivoire, tu vas sauter d’abord un pays. Il ne peut pas mentir que lui et nous, on a même frontière. C’est faux », a affirmé dans son allocution, Célestin Serey Doh.
La question de la nationalité reste un sujet sensible en Côte d’Ivoire, où elle a déjà été utilisée comme un outil politique dans le passé. Ces déclarations du ministre interviennent dans un contexte politique tendu, à neuf mois de l’élection présidentielle. Elles ont donc provoqué un tollé dans la classe politique et sur les réseaux sociaux.
Blaise Lasm, cadre du PPA-CI (Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire), a réagi vivement sur Facebook. « Je me demande comment devraient se sentir Adama Bictogo, Adama Tounkara et bien d’autres quand un ministre de leur parti brocarde le président du PDCI parce que son patronyme Thiam ne se trouve nulle part en Côte d’Ivoire selon le ministre en question ? », s’est interrogé le militant du parti de Laurent Gbagbo, estimant que ces déclarations xénophobes traduisent une certaine fébrilité du camp présidentiel à l’approche des élections.
Le Dr Osman Chérif, secrétaire national aux affaires extérieures de la J-PDCI (Jeunesse du PDCI), a quant à lui déposé une plainte officielle auprès du procureur de la République pour « propos xénophobes et incitation à la haine identitaire ». Dans sa lettre, il cite les articles 227, 229 et 231 du Code pénal ivoirien, qui punissent les actes de racisme, de xénophobie et de diffusion d’informations mensongères à caractère discriminatoire. Il demande une enquête pour préserver « la quiétude sociale et l’unité nationale ».
Du côté du RHDP, certains tentent toutefois de relativiser l’affaire. Yacouba Doumbia, journaliste proche du parti au pouvoir, estime que les propos de Serey Doh, bien que « discutables », ne doivent pas occulter le « véritable sujet » : la nationalité de Tidjane Thiam. « Le véritable sujet réside dans le mensonge érigé en stratégie au sein du PDCI, dont le président a acquis une nationalité étrangère par naturalisation », écrit-il. Il rappelle également les épreuves subies par Alassane Ouattara, dont la nationalité ivoirienne a été contestée dans les années 1990, et souligne que « comparer les cas Tidjane Thiam et Alassane Ouattara relève de la mauvaise foi ».
Le président du PDCI, pour sa part, n’a pas encore réagi publiquement à ces attaques.